“Salve Maria” de Mar Coll

Affiche de Salve Maria de Mar Coll, Escandalo Films & Elástica Films, Espagne, 2024.

Salve Maria de Mar Coll

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Ça parle de quoi ? Maria est une une jeune écrivaine en dépression post-partum, qui se passionne pour un fait-divers d’une mère ayant commis un double infanticide.

On trouve quoi dans ce film ? L’interprétation tout en mystère de l’actrice Laura Weissmahr + de l’étrange + du gore + un récit sans concession de la dépression post-partum + du catalan + la ville, la montagne et la mer + des citations de Sylvia Plath, Simone de Beauvoir et Adrienne Rich + la quête de sens et de liberté d’une femme qui appelle à l’aide + le portrait d’une mère.

Qu’est-ce que j’en pense ?

Attention, œuvre dérangeante. Dans la forme déjà, car le film, drame social, flirte avec l’étrange, voire l’horreur et le gore — âmes sensibles, soyez prévenues : certaines scènes peuvent être troublantes, comme la césarienne de Maria qui s’ouvre, ou encore un corbeau qui lui marche sur la tête. Le film propose une photo grise, granuleuse, parfois anxiogène, toujours à la limite du réalisme, comme si un voile terne s’opposait systématiquement à ce que la lumière passe. Normal, Maria, anti-héroïne formidable, ne réussit pas à la voir au bout du tunnel, la lumière. Elle vient de donner naissance au petit Eric, avec son compagnon bien sous tout rapport, Nico. Et elle ne s’en sort pas. Baby-blues, manque de sommeil, déséquilibre de la répartition des tâches au sein du foyer, désaccord dans la manière d’élever l’enfant ? Ça n’est pas vraiment ça. Et si, pour Maria, le mal venait de plus loin. Et si, Maria regrettait d’avoir donné naissance, si Maria regrettait d’être mère ? Salve Maria de Mar Coll, librement adapté de l’ouvrage Pas les mères de Katixe Aguirre (traduit de l’espagnol par Lise Belperron et publié chez Globe en 2021), fait le portrait d’une figure qui, depuis la nuit des temps vient frotter là où ça fait mal et perturber l’ordre établi : la mère qui aurait aimé ne jamais le devenir, voire la mère qui tue ses enfants (coucou Médée). Construite autour d’un fait-divers qui défraie la chronique — une jeune mère tue ses jumeaux, l’histoire de Maria déroule ses méandres en soulevant mille questions sans jamais y répondre : comment parler à son enfant quand on a rien à lui dire ? Comment se sentir continuer à vivre ? L’instinct maternel, ça existe ? Est-ce qu’on peut avoir un enfant, un travail, un mari et être femme, tout en même temps ? Comment appeler à l’aide ? La faute à qui ? Mais ne vous inquiétez pas, si des portes demeurent ouvertes et certains arcs narratifs non résolus, vous ne resterez pas sur votre faim. En effet, la réalisatrice, courageuse, conclut son film par un épilogue qui prend parti, à rebrousse-poil et à l’encontre de la bien-pensance généralisée — quoi de plus beau pour une femme qu’être mère ? Être libre ! Maria se sauvera elle-même.

Laura Weissmahr incarne Maria dans Salve Maria de Mar Coll.

Comment voir ce film ? En salles depuis le 20 août.


La fiche d’identité du film : Salve Maria de Mar Coll, Espagne, 2024, 1h51.

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“Les féministes t’encouragent à quitter ton mari, tuer tes enfants, pratiquer la sorcellerie, détruire le capitalisme et devenir trans-pédé-gouine” d’Alex Tamécylia