“H24” de Nathalie Masduraud & Valérie Urrea
Affiche de H24 - 24 heures dans la vie d’une femme de Nathalie Masduraud & Valérie Urrea, Arte France et Les Batelières Productions, 2021.
H24 - 24 heures dans la vie d’une femme de Nathalie Masduraud & Valérie Urrea
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Ça parle de quoi ? Vingt-quatre courts-métrages inspirés de faits réels mettent en scène des abus et des violences vécus par des femmes, dans leur quotidien, à toute heure du jour et de la nuit.
On trouve quoi dans cette série ? Des insultes + des violences + des viols + du harcèlement + de l’emprise + de la solitude + du sexisme + de la misogynie + du racisme + de la peur + des suicides + de la dépression + des femmes résiliantes + du courage + de l’instinct de survie + de la sororité + un appel à une prise de conscience généralisée pour que cessent enfin les violences faites aux femmes.
Qu’est-ce que j’en pense ?
On a toutes été emmerdées dans le bus, dans la rue, dans un bar. On a toutes été insultées parce qu’on était femme, racisée, queer. On a toute été humiliée par notre collègue, notre boss, notre professeur. On a tout entendu : « T’es belle, ça te dit de prendre un verre ? », « Tu t’es prise pour miss monde ? », « Rentre chez toi sale pute », « Tu suces ? » On a tout supporté, les frotteurs dans la foule, les brimades au travail, les reproches, les abandons, les incompréhensions, les impatiences. On a toujours eu tort, de mettre des talons ou de ne pas en mettre, de porter une mini-jupe ou le voile, de rentrer tard, de rentrer tôt, de marcher dans la rue, de prendre les transports en commun, de sortir de chez soi ou de rester à la maison, de crier ou de se taire, de toute façon c’est notre faute.
De la micro-agression au viol, la série H24 – 24 heures dans la vie d’une femme fait état de la violence exercée quotidiennement à l’encontre des femmes, violence dans l’espace public et privé, violence qui semble ne jamais cesser. Parce que contrairement à ce qu’écrivait Stefan Zweig dans sa nouvelle quasi éponyme (le titre du novelliste autrichien est Vingt-quatre heures de la vie d’une femme et non pas dans), une femme ne passe pas 24 heures de sa journée à s’inquiéter du bien-être de l’homme qu’elle aime. Non, ce que fait chaque jour une femme c’est mettre en place des mécanismes de défense pour se prémunir des agressions, c’est apprendre à gérer ses crises de panique quand elle monte dans un autobus la nuit, c’est ressasser les violences passées, c’est essayer de recomposer la nuit d’avant nimbée de doute parce qu’elle a été droguée au GHB, c’est se barricader dans son appartement pour éviter que son harceleur de copain ne l’atteigne, c’est prendre son courage à deux mains et porter plainte contre son agresseur, c’est faire comme s’il ne s’était rien passé, c’est garder la face en toute circonstance même si la circonstance est avilissante, c’est être polie parce qu’on lui a appris à l’être peu importe ce qui lui arrive, c’est hurler, c’est se taire, et parfois c’est se jeter par la fenêtre, parce que vivre comme ça ça n’est plus vivre c’est survivre.
Plonger dans 24 heures de la vie d’une femme, de toutes les femmes, de nous, de nos mères, de nos sœurs, de nos filles, de nos amies, de cette inconnue là-bas dans la rue, ou de cette autre à côté de nous au restaurant, c’est plonger dans la violence qu’elle subit au quotidien. Et c’est parfaitement rendu dans cette mini-série qui fait intervenir 24 autrices (notamment Alice Zeniter, Sofi Oksanen, Lydie Salvayre, Lola Lafon, Blandine Rinkel, Chloé Delaume, Aloïse Sauvage…) ainsi que pléthore de talentueuses comédiennes (comme Luàna Bajrami, Romane Bohringer, Galatea Bellugi, Camille Cottin, Florence Loiret-Caille, Garance Marillier, Valeria Bruni Tedeschi, Noémie Merlant, Annabelle Lengronne, Anaïs Demoustier, Céleste Brunnquell, Souheila Yacoub, Diane Kruger…) dans tout un tas de langues (français, allemand, anglais, italien, espagnol, danois, russe, néerlandais, polonais). La série s’engage au côté des femmes, et appelle avec force à la sororité, à la libération de la parole et surtout à son écoute et nous enjoint à, comme le dit merveilleusement bien Déborah Lukumuena dans le segment Le Cri défendu écrit par Jo Güstin : « Je n’ai plus aujourd’hui l’excuse de la stupeur, on va faire comme on a dit, comme on s’était promis la fois où on a eu peur, il nous faut ce réflexe quand c’est une femme qui crie, de sauver notre espèce. » À montrer à toutes les femmes qui se reconnaissent, et à tous les hommes qui veulent agir avec elles et pour elles.
Diane Kruger, Souheila Yacoub, Anaïs Demoustier, Maryline Canto, Déborah Lukumuena, Elina Löwensohn, Camille Cottin, Annabelle Lengronne et Noémie Merlant dans H24 - 24 heures dans la vie d’une femme.
Où voir cette série ? Gratuitement sur Arte, jusqu’au 21 octobre 2026.
La fiche d’identité de cette série : H24 – 24 heures dans la vie d’une femme, une mini-série de 25 épisodes d’environ 5 minutes chacun, sur une idée originale de Nathalie Masduraud et Valérie Urrea, Arte France, 2021.